Quelques unes de ses photos, notamment sa série sur le voile, circulaient sur Facebook et j’ai souhaité vous la faire découvrir.
Elle est née en 1969 à Sana’a au Yémen, où elle vit et travaille actuellement.
Alors qu’elle étudie le commerce international à Washington, elle commence à s’intéresser à la photographie.
En 1996 elle devient membre fondateur du collectif Al-Alhaqa,
puis est nommée en 1999 première femme Yémenite photographe par l’Université de Sana’a.
Son travail est publié dans des médias tel que The Guardian,
acquis entre autres par le British Museum de Londres et exposé internationalement.
« Il faut un indéniable courage, lorsque l’on est femme et yéménite,
pour affirmer avec force son opposition déterminée à la façon dont les fondamentalistes musulmans font disparaître,
jusqu’à l’invisibilité, toutes les femmes. »
Bushra exposa à Paris
La photographe explique avoir commencé cette réflexion sur le Hijab
en retournant dans un village où les femmes de la tribu portaient les vêtements traditionnels chamarrés
des premières photos et en les voyant couvertes de noir de la tête aux pieds dix ans plus tard.
« C’est une tradition qui vient d’Arabie Saoudite », dit-elle,
« ce n’est pas la nôtre ».
De même, le voile peut être un moyen d’expression
des femmes arabes ou, comme le dit l’écrivaine égyptienne
Nawal Elsadawi, un moyen de se dissimuler, comme le maquillage ailleurs et provoquer l’ironie,
voire l’humour, et donc un questionnement.
La photographie est un moyen de montrer, de dénoncer,
mais aussi de lutter contre les stéréotypes négatifs sur les arabes et les musulmans
pour cette artiste rayonnante qui a vécu aux Etats-Unis et s’y trouvait le 11 septembre.
« J’ai trouvé que nous, les Arabes et les musulmans, étions soit diabolisés, soit romancés.
Ce paradoxe s’observe particulièrement au sujet de la femme au moyen orient,
qui dans l’imaginaire populaire du nord est à la fois l’image de l’exotisme, de la beauté et du mystère,
mais aussi celle de l’impuissance, de l’oppression et de la laideur. »
Les autres photos de cette exposition temporaire montraient également des femmes dans des scènes de rue,
de la vie quotidienne ou, de façon plus militante, dans des poses soulignant leur statut inégal face aux hommes.
Au Yémen, le mariage précoce des petites filles est une coutume tribale
car les hommes trouvent normal qu’une nouvelle épouse vigoureuse vienne aider aux tâches ménagères
et aux travaux des champs celle qui a perdu ses forces.
Des artistes, des personnalités politiques arabes et européennes tentent de faire changer les mentalités.
La guerre ralentit ces efforts mais ne décourage nullement les femmes exceptionnelles
qui osent dénoncer ces traditions cruelles
Cette négation, mise en évidence par étapes, devient une fable cruelle, lancée comme un cri épuré,
une forme de dénonciation symbolique fondée sur la seule logique des images.
Dans The Hijab Series, c’est en couleurs que
La mère, la fille et la poupée,
vont peu à peu se fondre toutes trois dans le noir au fur
et à mesure qu’elles doivent porter le voile sombre de plus en plus couvrant.
Restent, sans que l’on puisse dire ce qu’ils essaient d’exprimer,
trois paires d’yeux derrière la mince ouverture.
Et si… propose une inversion, sinon des rôles, du moins des apparences.
L’homme est en blanc, la femme vêtue de noir, dont au début on ne voit même pas les mains.
Puis, en séquence, l’homme est attifé du costume noir et de plus en plus intégral de sa femme et,
à la fin de ce bref récit en noir et blanc,
il a perdu l’expression de ses mains, regarde au travers de la fente du voile
quand sa femme a laissé apparaître cheveux,visage et mains.
Cette pointe d’humour dédramatise la revendication, pourtant toujours aussi ferme.